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Theme Park

Jeu méga Cruel #3

Theme Park, PC, cover

Type de jeu

Sur fond de couleurs flashy et de bonnes intentions, un jeu qui cherche juste à ruiner notre confiance, notre estime de soi et notre vie tout court.

Date de sortie sur nos machines

1994 sûr. Juin ? Aucune fichtre idée. Je soupçonne plutôt un mois que tout le monde déteste.

Développeur

Bullfrog Productions, Ltd. qui avait décidé de laisser parler son côté hater de l'espèce humaine pour ce jeu.

éDITEUR

Electronic Arts, Inc. Peut-être que la faute leur revient si Bullfrog était méchant, tiens.

Theme Park : disponible sur GOG.com. Les gars ne déçoivent jamais.

Quand mon père venait me chercher un week-end par mois, on partait souvent chez de bons amis à lui. Des gens très sympas, dont Eddie Chatterton, qui possédait une Master System ! Vous vous rendez compte ? Mais je ne viens pas pour parler d'elle aujourd'hui. Plutôt du PC qui ornait l'autre extrémité du salon. Un PC qui datait d’avant les PC que moi j’ai connus ! Équipé de Windows 3.1, sans lecteur CD-ROM, mais un simple emplacement pour insérer des disquettes. Et dans cette collection de disquettes : Worms ! Ah non, je ne parle pas de ça non plus. Euh, Theme Park ! Oui ! Voilà. Un jeu dans lequel je construis mon propre parc d’attractions, me confie Eddie. Ah bah OK ! On dirait bien que je vais adorer ce truc ! Je peux essayer pendant que vous prenez l’apéro ? Merci ! Pendant que vous mangez et que vous jouez à des jeux de société aussi ? Ah bon je peux pas ? Oh tiens, pas grave, j'ai déjà perdu.

Horaire d'ouverture : samedi soir

Theme Park, PC, main menu

Patate de forain

Theme Park, PC, beginning

Quand j'imagine la prise en main d'un jeu de gestion de nos jours, je me vois guidé gentiment à travers les différentes fonctionnalités via un tutoriel bien pensé. Dans les années 90, tout ceci n’existait pas ou presque. On devait se prendre par la main tout seul, lâché dans la fosse aux lions direct, et on n’avait qu’à se débrouiller, à cliquer sur des boutons en espérant que ça fonctionne. Dans Theme Park, j'avais au moins la chance de lire du français. Sauf que je ne comprenais pas beaucoup plus que si ça n'avait pas été traduit, vu la quantité et la diversité d'information à ingurgiter. Je jouais encore à Aladdin sur Mega Drive à cette époque. Ça ne représente pas le même investissement cérébral. Du coup, une partie de Theme Park avait beau commencer gentiment, avec le placement de mignonnes attractions et de petites boutiques rigolotes, je sombrais vite dans une sorte de spirale vicieuse de laquelle je ne ressortais jamais.

En vérité, on se fait totalement accaparer par le recrutement du personnel, les ajustements des prix de chaque article de chaque magasin, le nettoyage des ordures, la réparation des appareils cassés, le salaire des employés, le stock de marchandises, la recherche de nouvelles technologies, la dose de sucre dans les glaces et de sel dans les frites (je vous jure, ça va aussi loin que ça)... sans oublier les concurrents qui achètent des parts chez nous, les syndicats qui nous sucent le sang et les pauvres actionnaires qu'on ne peut plus inonder de billets ! LE TOUT SANS PERSONNE QUI N’EXPLIQUE RIEN. Voilà, je me mets à parler comme un ignoble requin de droite, c'est dire à quel point ce jeu me perturbe encore aujourd'hui. Alors oui, il y a bien un conseiller qui affiche des messages de temps en temps, mais il sert surtout à rabâcher qu'on fait n'importe quoi sans apporter de solution.

Theme Park, PC, interface, attraction
Theme Park, PC, rollercoaster, river

-Gamin, tu gères ton parc n'importe comment.

-Euh monsieur, j’ai neuf ans, vous voulez pas m’aider juste un peu ? 

-Démerde-toi, on t’a dit !! 

Sans surprise, mes parties se soldaient toutes par des défaites cuisantes. Je cherchais à m'améliorer, pourtant ! En plaçant des allées goudronnées plutôt comme ci, des files d'attente plutôt comme ça, en décalant le château gonflable de quelques cases, ou en vendant le coca un peu plus cher. Rien à faire. Je partais en banqueroute en dix minutes. Remarque, ça ne se passait pas beaucoup mieux sur d'autres titres du même genre, comme Master of Orion II  et Civilization II. Adorer les jeux de gestion et maîtriser les jeux de gestion, ça n'a rien à voir. J'ai mis un paquet d'années à capter la nuance, je crois.

Les graphismes ont terriblement souffert de l’évolution du matos et des technologies, mais en plissant un peu les yeux, on parvient à deviner que tout s’efforce de paraître mignon. Le style cartoon VGA se marie bien avec le thème du parc à thème. Theme Park, quoi. Ah bah oui, le nom est bien trouvé, au moins. On s’amuse souvent en regardant les visiteurs se perdre dans le labyrinthe, ou s’ennuyer à mourir dans le manège pour enfants. Les bâtiments, échoppes et structures s’affichent en caricatures ultra exagérées des bibelots qu’elles vendent, ou des activités qu’elles proposent. Cette insouciance ne vaut que pour le début de partie, car quand l’argent vient à manquer, les techniciens s’en vont et les attractions se mettent à exploser. En parallèle, les frites trop salées font vomir tous les clients, et des malfrats nous délestent du peu qu’il reste dans les caisses.

Cruauté visuelle

Theme Park, PC, research panel
Theme Park, PC, shops

Le parc paradisiaque se transforme en carnaval de l’enfer, et on finit par éteindre l’ordinateur en pleurant, juste après avoir vu notre avatar mettre (presque) fin à ses jours dans la cutscene de défaite. Mais si par miracle vous parvenez à bâtir un grand complexe autosuffisant, le résultat rend vraiment bien… en tout cas quand on dézoome suffisamment pour effacer les pixels au maximum.

C'est quoi ce cirque ?

Si la direction artistique a mal vieilli, alors la musique a déjà été enterrée depuis longtemps ! Il faut vraiment s’accrocher pour supporter ces mélodies récupérées dans les kermesses les plus piteuses de la planète. Heureusement que les morceaux changent souvent, vu qu’ils se lancent en fonction de l’attraction la mieux centrée sur l’écran (enfin je crois, ça doit fonctionner à peu près comme ça). J’ai vraiment galéré pour trouver le seul morceau que j’apprécie un peu dans tout ça. Sur YouTube, on trouve quelques trucs de la version Saturn, ou les O.S.T. complètes sur Mega Drive et Super NES, mais d’un seul bloc. Je me rappelle même plus comment j’ai réussi à upload le titre en MIDI ; sans doute en passant quelques sites obscurs, et en triturant plusieurs logiciels en ligne. Personne n'a semblé posséder le courage nécessaire pour diffuser la totalité de l'album de la version PC sur internet. Ou plus probablement, il n'existe personne au monde d'assez cruel pour partager tous ces morceaux. Imaginez le nombre d'individus qui aurait pu en faire les frais, mais dont la santé n'a pas été détruite grâce à eux ! Russell Shaw, tu sais que je t’adore grâce à ton taf de malade accompli sur Dungeon Keeper. Mais sérieux, sur Theme Park, tu m’as détruit les oreilles plusieurs fois. Bon, j'avoue qu'au final, rien d'autre que ces compos de l'enfer n'aurait pu mieux accompagner mes parcs claqués au sol. Encore plus quand la musique déconnait pour notifier qu'une attraction allait bientôt imploser. Ça, ça me faisait marrer. Et finalement, celle de la cabane dans les arbres, je l'aime beaucoup. La version que j'ai trouvé vient d'une carte son encore plus éclatée que celle que j'avais, mais si je me mets à pinailler pour ce genre de détails, autant aller me faire internet tout de suite.

Theme Park (PC) - Tree House
00:00 / 02:00

Même Tarif pour tout le monde

Ce fameux soir de la découverte, les adultes mangent et picolent, les plus jeunes enfants somnolent devant la télé, VHS du Roi Lion toute neuve en train de tourner dans le magnétoscope. Et moi je… bah j'enchaine ma troisième défaite a Theme Park en moins d’une heure. Je vois que les darrons commencent à se moquer gentiment, l'alcool aidant peut-être. Alors je demande à Eddie de prendre ma place pour étudier sa stratégie, afin de progresser un peu, quoi. Tout le monde vient admirer ses compétences, qui se révèlent à peine meilleures que les miennes. Au bout de dix minutes, il quitte sa chaise la tête basse pendant qu’on se fout de lui.

Theme Park, PC, gif

Quelques mois plus tard, j'ai réussi à me dégoter une copie du jeu, peut-être celui d'Eddie d'ailleurs, je ne me rappelle plus. Bien installé devant l'ordinateur de beau papa, j'ai cru enfin pouvoir percer les secrets de Theme Park. Mais un mécanicien trop peu payé en a décidé autrement. Bien qu'arrivé sur le lieu du toboggan serpent à réparer, il a tranquillement mâchonné son sandwich en me fixant intensément. Je vous jure qu'il savait que je me trouvais de l'autre côté de l'écran, à le rémunérer au lance-pierres. Il me haïssait, et me l'a fait comprendre en laissant l'attraction exploser. J'avais les morts sur la conscience, pas lui, et j'ai fait faillite deux minutes après. Allez gamin, va te coucher après ça, et va acquiescer sans broncher quand ta mère te souhaite de faire de beaux rêves. 

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