Altered Beast
Jeu Trop Marrant #1

Type de jeu
Sauvetage de demoiselle en détresse à la fois hyper classique et complètement barré. L’un des nanars les plus célèbres du monde vidéoludique.
Date de sortie sur nos machines
Novembre 1990, le même jour que le débarquement la Mega Drive en France. Le jour où j'allais perdre mon âme pour plusieurs années.
Développeur
Attention, je prends une grande inspiration : Version arcade développée par la Team Shinobi, appartenant à la division Sega R&D 1. Portage sur Mega Drive opéré par Rieko Kodama et Toshinori Asai.
éDITEUR
Sega Enterprises LTD. Un.e certain.e No Nukes a coordonné le portage sur Console. Que signifie Coordonné ? Ehhh, oui hein ! D'accord avec No Nukes aussi, enfin, j'aime bien son pseudo.
Altered Beast : disponible sur Mega Drive Mini, et le SEGA Genesis Nintendo Switch Online.
Fin 1990, Peut-être à noël, mais pas sûr, au beau milieu du salon du domicile maternel. Ma mère et mon beau-père laissent ma sœur Elena Vestibule et moi ouvrir un gros carton. À l'intérieur, la SEGA Mega Drive : la toute nouvelle console, ultra puissante, giga cool, indispensable ! Avec Altered Beast fourni d'office dans le carton (prononcer Alteurède Baiste). Trop génial ! Euh, je crois ? Heureusement pour lui en tout cas, sinon je ne crois pas que grand monde y aurait touché. Certes, la borne d'arcade fonctionnait plutôt bien, mais je n'en avais pas la moindre idée. Comme d’autres gros malins se pensant visionnaires, mon beau-père a acheté la machine un poil trop tôt, ratant l’occasion de récupérer le pack avec Sonic à la place. Mais est-ce vraiment une si mauvaise chose ? N’ayant rien eu pour comparer pendant plusieurs semaines, je lui ai voué un grand amour, à cet Altered Beast.
Une Bête d'Alternative

Amour par défaut, mais amour quand même. À cinq ans, je vouais un grand amour à tout un tas de trucs ; et quand j’ai vu où s’arrêtaient les limites du jeu, trop tard ! Mon cerveau avait déjà subi des dommages irréversibles, j’allais rester fan de cette série Z vidéoludique pour l’éternité. En fait, je plains ceux qui ont eu Sonic au lieu de celui-ci, en achetant la console quelques mois plus tard (et encore plus ceux qui ont eu Sonic 2 avec la Megadrive 2). Parce que tout le monde a fini par mettre la main sur Sonic, mais peu de gens ont eu la chance de plonger dans le monde… disons “original” d’Altered Beast.
C'est l'histoire d'un dieu...

Malgré la mise en scène plutôt sympa de son arrivée dans l'appartement, la Mega Drive ne nous appartenait pas vraiment, à Elena et moi. Mon beau-père se l'avait achetée pour lui, et nous laissait y jouer, voilà tout. sauf qu'il n'a jamais trop apprécié ce titre, et on a pu se le farcir à volonté (le jeu, pas le beau-père). Altered Beast nous fait vivre une étrange épopée. pour illustrer l'euphémisme : on incarne un bodybuilder zoomorphe en slibard qui défonce des hordes de créatures semi-mythologiques (parfois sacrément flippantes) à l’aide de ses poings, ses pieds ou divers pouvoirs plus ou moins utiles. Un bodybuilder ressuscité par Zeus, parce que pourquoi prendre quelqu’un de vivant déjà dispo, hein ? Tout ça pour aller sauver Athéna ou je ne sais plus laquelle de ses filles, qui a eu la malchance de se faire importuner dans la rue par Hadès ou un démon quelconque.
Genre Zeus ne pouvait pas y aller lui-même non plus, déguisé en bouquetin ou en bourrasque de vent, tiens. Nan, ça il le fait juste pour fricoter dans tous les sens. Et genre Athéna aurait besoin d’un coup de main de la part d’un beau-gosse zombie pour tabasser ses adversaires ? C’est pas la déesse la plus badass de l’Olympe ou je sais pas quoi ? Quel genre de message essaie-t-on de faire passer ici ? Eh, même pas besoin de mettre des mots dessus. Bref, les décors n’ont aucun lien entre eux, et n’ont pas beaucoup de sens en eux-mêmes non plus. On ne se croirait pas souvent en Grèce, quoique les stages s'inspiraient peut-être de régions existant dans la mythologie. J'en sais rien, je n'ai jamais visité le tartare, après tout. Le gameplay ? On tape tout ce qui bouge en avançant de gauche à droite. Avec les mains ou les pieds comme on l'a déjà dit, ou en sautant, ou vers le haut après s'être baissé. Ça fonctionnait pas mal, ça restait fluide, malgré quelques hitbox bizarres qui nous ont fait perdre un paquet de parties.


Mais tous ces détails, on s’en moquait à fond, tant que ça castagnait de partout. mais après avoir mangé trois boules de cristal, on passe dans une autre dimension, car notre culturiste préféré se transforme ! Une forme garou par stage. D'abord en loup, puis en dragon, en ours ou en Tigre, et enfin... euh, encore en loup, mais avec des poils colorés différemment. Toutes ces bestioles gagnent ainsi de nouvelles manières de tabasser les aberrations qui se mettent en travers de leur chemin. Et même si ça ne révolutionne pas l'expérience d'un niveau à l'autre, ça m'impressionnait suffisamment pour que je crie au génie. J'adorais le design du tigre, mais moins ses aptitudes de boule de feu qui vole n'importe comment, où d'attaque verticale pas hyper optimisée contre des ennemis arrivant en majorité devant ou derrière nous. L'ours par contre, son souffle pétrifiant, ça me vendait du rêve.
Toujours du haut de mes cinq balais, je trouvais tout ce bazar assez horrifiant, mine de rien. L’approximation des graphismes n’enlevait rien à l’aspect sombre et glauque d’Altered Beast, sorte d’apologie d’un grand n’importe quoi angoissant et dépressif. Nos gros bourrins massacreurs de monstres pétaient peut-être la classe (j'avais cinq ans), on sentait qu’ils ne passaient pas un bon moment. Il fallait avoir une case en moins pour accepter le calvaire qu’ils s’infligeaient, princesse offerte en trophée à la fin ou non. À côté de ça, le périple de Mario ressemblait à une promenade de santé. Bon, ils n’avaient pas le choix au final, vu que Zeus les a ramenés de l'au-delà pour les envoyer au casse-pipe.
Pas marrant du tout


Sinon, je parlais des niveaux sans rapport un peu plus haut ; là non plus ça, ne les empêchait pas de produire un effet anxiogène, chacun à leur manière. Des parois visqueuses d’une grotte infestée de sangsues géantes à la froideur d’un temple hanté abritant divers types de démons ou morts-vivants, on ne comptait plus les sueurs froides qui nous glaçaient le dos à chaque partie. Et bien sûr, les diverses métamorphoses de Neff, le grand méchant avec sa voix de tuberculeux au nez bouché, elles provoquaient toujours un haut-le-coeur de dégoût horrifié.
waze fom wou gwaive
La musique oscille entre mélodies inspirées et envolées un peu plus regrettables (que j’admire toutes à égalité, la nostalgie aidant). À l’image des mécaniques et des graphismes, on sent que Kazuhiko Nagai, responsable du portage des morceaux sur Mega Drive, a pas mal tâtonné ! A-t-il volontairement laissé ces instrus nasillardes dans le produit fini, ou n'a-t-il jamais réussi à dompter le processeur sonore de la console ? Rien de personnel, hein, J'ai dit que j'adorais. Et Sur Arcade ? Tohru Nakabayashi a fait mieux ? Oui bah ça ne sonne pas pareil, forcément. de toute façon, les deux musicos ont fini par laisser tomber, les titres des deux derniers niveaux étant les mêmes que ceux des deux précédents. Il n’empêche que ça faisait le taf ; chaque chanson se drape d’un petit air épique aux volutes oppressantes. J’en tremble encore aujourd’hui, de répulsion ou de plaisir, je ne sais pas trop. Peut-être un mélange de tout ça. Bon, je grommelle, mais en vrai, si un dieu me ressuscite un jour pour aller casser des bouches à des fourmis bipèdes géantes et des licornes violettes ninja, je lui dirai OK, à condition de me refiler des ear pods et de passer cette playlist.
Pourquoi c'est drôle alors ?
Ben oui, pourquoi Altered Beast m'a autant marqué ? Déjà, parce qu'on pouvait y jouer à deux en même temps ! Trop ! Gé ! Nial ! Et voilà que le second loup garou devenait vert forêt, et que le deuxième dragon se parait d'écailles caca d'oie, et que l'autre ours, euh... se peignait en bleu turquoise ? Bon, pourquoi pas, les gars. Elena me laissait parfois galérer deux ou trois parties tout seul, avant d’intervenir pour me filer un coup de main. Elle savait très bien que je n’arriverais jamais au bout sans son aide, et ce malgré le faible nombre de niveaux. Je trouvais le dernier stage archi dur. Dès que l’un de nos personnages récupérait un bonus, on imitait le bruit qu’il faisait, avant se de marrer pendant une minute non stop. Ça donnait un truc comme :”Hao-eh-ahp” ! Encore plus hilarant quand les deux guerriers font leur annonce quasi en même temps. Des années après, on pouvait encore envoyer cette punchline à l'autre, et le faire pleurer de rire.

En fait, notre champion disait “Power Up” mais pour le comprendre, il fallait avoir un doctorat de voix anglaises digitalisées en 16-bits et nous, on venait tout juste de commencer nos études en primaire. D'ailleurs, on appelait ce jeu Alteurède Baiste, et on n'était pas les seuls. Aussi, j’étais persuadé qu’une transformation secrète existait, à mi-chemin entre l’humain et l’animal garou. On dirait loup semi-garou du coup ? Ou juste mec très moche et très poilu. ce qui fait que je tapais sur tous les boutons lors de la cinématique de métamorphose en espérant débloquer la feature en question. En fait, mes voisins m’avaient fait croire ça pour se moquer de moi. Sacrés Nelson et Mortimer Paprika ! Je vivais là le début d'une longue série de turlupinades, mais aussi de fabuleuses aventures. Merci les gars.



